• L'échapée Belle

    L'échapée Belle

     

    " Je suis coincée dans un monde de tourment. Depuis des  années, je cherche à m'en échapper. Espérant vivre dans la plénitude, sans douleur ni souffrance.
      Aujourd'hui, je n'ai plus le choix ! Je dois m'évader pour être heureuse. Dire adieu à ce cauchemar sans fin. Ma dernière escapade..."

     

    GENRE : Nouvelle

     

     

     
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    Note : Une nouvelle écrite pour le concours de nouvelle de ma ville.
     

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    Fuir. Il me fallait fuir. Hors du temps, hors de l'espace, hors de ces quatre murs, j'avais perdu toute notion de réalité. Depuis quand étais-je ici ? Enfermée comme un animal prisonnier de ses bourreaux. A chaque instant, j'attendais que s'abatte sur moi la fatalité, la fin de mon supplice. Pourtant, chaque seconde qui passait ne cessait de prolonger mon agonie. Je n'avais plus de force, plus de volonté propre, juste un objet perdu au milieu d'une déchèterie abandonnée de tous. Quel espoir me restait-il à cet instant ? Aucun. J'attendais seulement la fin.
    Petit à petit, je reprenais malgré tout un peu plus confiance en moi. Je devais accomplir le dernier acte de ma pièce personnelle, pour faire tomber le rideau sur la tragédie qu'était devenue ma vie.
    Je m'efforçai donc à garder mon esprit clair et une volonté déterminée pour réussir à me relever. Entendraient-ils mes pas ? Me verraient-ils tenter de fuir ? J'espérais que non, je voulais partir sur la pointe des pieds sans me faire remarquer.

    Prenant une profonde inspiration, je poussai de toutes mes forces sur mes jambes fragiles, des tremblements incontrôlés vinrent précipiter ma chute sur le linoléum d'un blanc immaculé. Ma respiration fut saccadée sous l'effet de l'effort que je venais d'accomplir. Mon souffle se fit plus rauque, tentant de reprendre une bouffée d'air qui avait du mal à atteindre mes poumons endoloris.
    Serais-je vraiment capable de quitter ce lieu ? Je devais me montrer courageuse pour m'enfuir de cet endroit morbide. Rien n'était aisé pourtant, mon corps m'abandonnait petit à petit. Essayant d'oublier cette douleur qui irradiait dans tout mon être, je roulai lentement sur le dos. Mes yeux fixèrent alors un plafond aussi blanc que le reste cette pièce, qui m'avait suivi ces dernières semaines. Le blanc ne signifiait pas pour moi, la pureté. Bien au contraire, elle était seulement synonyme de mort et de douleur. Une étape vers le trépas.
    Après un effort surhumain, je parvins malgré tout à me mettre sur mes deux jambes. Malgré moi, mes yeux parcoururent l'état lamentable de ma peau. Des hématomes étaient apparus partout sur mes jambes, mes bras, mais également sous ce vieux t-shirt déformé avec le temps. Avant de retomber de nouveau mollement sur le sol, je m'agrippai avec fermeté à un barreau du lit. Je tentais vainement de retrouver une respiration normale, pour continuer ma course vers la liberté.
    Mon cœur palpitait rapidement, n'appréciant guère le tour de force que je faisais subir à mon corps frêle.
    Frêle, je l'étais devenue. Certains m'auraient même qualifiée de décharnée, une ombre dans les ténèbres, une morte-vivante. Etait-ce tout ce qu'on retiendrait de moi ? J'espérais que non, bien que cela ne devrait plus m'inquiéter à cette heure. Pour le moment, j'avais une préoccupation nettement plus importante à faire : fuir.

    Je dus déglutir plusieurs fois, avant que les battements de mon cœur retrouvent un rythme régulier. Des vertiges troublaient ma vision, gommant sur son passage la réalité de ma situation. Je devais y arriver pour mon bien-être. Essayant de recouvrer mes sens, je repris une nouvelle goulée d'air aseptisée. Je détestai profondément cette odeur ! L'impression qu'elle me collait à la peau était très vivace. Si j'arrivais à sortir d'ici, je pourrais m'en débarrasser aisément. C'était juste une question de temps.
    Prenant sur moi, j'effectuai un premier pas incertain vers la fenêtre. La seule échappatoire pour recouvrer ma liberté ! Aujourd'hui, je comprenais enfin ce qu'un oiseau en cage pouvait ressentir. Comme eux, j'aspirai qu'à retrouver cette liberté et pouvoir m'envoler loin du mal et de la douleur. Un deuxième pas hésitant, une distance énorme me séparait encore de mon issue de secours. A cet instant précis, j'avais des doutes sur ma capacité à effectuer cet exploit. Je perdais petit à petit confiance en moi. Avais-je seulement été forte un jour ?

     

     

     

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  • Je me souvenais que dans le passé, on me disait toujours que j'étais une personne courageuse. Très peu de gens auraient eu le cran d'endurer ce mal qui m'avait rongé de l'intérieur, la majeure partie de ma vie. Avais-je seulement eu le choix ? Non, j'avais subi la situation. Tentant de maîtriser une chose qui était pourtant indomptable. Un monstre qui me dévorait de l'intérieur chaque minute.
    Cependant, aujourd'hui j'avais le pouvoir ! Le contrôle de ma vie, je pouvais décider du chemin à prendre.
    Un troisième pas venait affirmer ma conviction, essayant d'aller jusqu'au bout des choses. Cette pensée me ragaillardit, trouvant une nouvelle bouffée d'oxygène pour affronter le reste de la distance. Chaque nouveau pas se fit plus déterminé que le précédent, une force que je ne me soupçonnais pas vint pourtant donner un nouveau souffle de vie à mon corps. Des larmes de joie commencèrent à perler sur mes joues livides, le bonheur de toucher au but était si enivrant !
    J'allais pouvoir laisser derrière moi les souffrances de mon quotidien si étouffant. Une nouvelle chance s'offrait à moi. Je n'étais plus capable de la laisser s'échapper, je comptais bien l'agripper de toute mon âme. Chaque pas me rapprochait de mon but, de ma sortie.

    Quand enfin, ma main atteignit le rebord de la fenêtre, je poussai un cri de joie. Je m'en moquais si l'on m'entendait. Je n'avais plus rien à perdre désormais.
    Ma seconde main parvint à s'accrocher tout aussi rapidement à ce rebord, le seul rempart était cette fenêtre fermée. Avec un empressement que je ne contrôlais plus, je l'ouvris. Un courant d'air frais vint ébouriffer le peu de cheveux qui me restaient sur le crâne. Bien que la vigueur dans mes bras s'amenuisait de plus en plus, je fis le dernier effort vers cette douce lumière. J'enjambai machinalement le rebord de la fenêtre, quand soudainement mon cœur sembla s'emballer de nouveau. Comme une cavalcade qui traversait une ville assiégée, mon cœur était piégé pour de bon. Les vertiges me reprirent avec plus de violence que précédemment, puis s'ensuivit un « bip » sonore et puissant. Non ! Je ne voulais pas qu'ils me reprennent ! Je ne voulais plus souffrir ! J'étais si près de mon but que je ne pouvais tout simplement plus abandonnée. C'est avec un désespoir décuplé par cet horrible son, que je me jetais de la fenêtre. La hauteur était immense, mais je n'avais pas peur. La chute me permit de déplier mes ailes vers cette douce libération. A l'instant où j'atterrissais au fond des ténèbres, je sus que j'avais gagné. J'étais libre ! Je ne ressentais ni la douleur ni la réalité. Tout était diffus, les sensations qui s'accrochaient à moi n'étaient plus que spirituelles. Le bonheur et l'amour.

    Pourtant, de ce côté je pouvais encore apercevoir la haute bâtisse grisâtre qui me dominait de toute sa hauteur. Bien que mon âme se trouvait désormais dans les limbes, je l'apercevais toujours comme un lieu de torture pour le corps que j'avais abandonné. Etait-il toujours en train de souffrir ? Quels sévices subissait-il en ce moment même ? L'hôpital où je venais de passer plusieurs semaines avait eu raison de mon corps, mais non de mon âme. Je l'observais avec curiosité. Finalement, nous n'avions jamais pu nous comprendre. Ce bâtiment sinistre à mes yeux abritait des âmes retenues prisonnières contre leur gré. Les médecins et infirmières n'étaient que les justiciers d'un démon cruel qui nous enchaînait à une vie qui n'était plus la nôtre. J'avais pris ma décision et je ne le regrettais pas. Mes parents seraient-ils compréhensifs ? Je venais de les abandonner dans cette pièce. Je pouvais encore les entendre en ce moment même. Tout ce que je souhaitais désormais, c'est qu'ils me pardonnent de les avoir abandonnés ainsi. J'aurais aimé leur dire l'amour que je leur portais, mais cela était impossible dorénavant. Soudainement, mon esprit s'effaça pour se retrouver dans la chambre que je venais de quitter. Mais, ma vision était différente. Je voyais désormais sous un autre angle, le combat acharné que mes « anciens bourreaux » étaient occupés à mener, sans l'once d'une victoire pour eux.

     

     

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  • Les infirmières se mirent à courir en tout sens, l'une d'entre elles, parti quérir un médecin, tandis qu'une petite brune tentait vainement de faire sortir les parents de la chambre de la jeune fille. Sa mère désemparée par la perte imminente de son enfant s'accrochait avec désespoir à son bras. Ses yeux s'étaient transformés en cascade, laissant couler ses larmes sur son visage fatigué et blême. Son mari malgré la douleur au fond de son regard essaya de raisonner sa femme, mais elle n'écoutait plus personne. Le monde était devenu sourd pour cette mère affligée par la perte de sa chair et de son sang. L'infirmière appuyée par le père de la jeune fille parvint à force de manœuvres à la faire sortir de la pièce en ébullition. Avant que la porte ne se ferme sur l'équipe médicale, les parents se laissèrent glisser au sol. Le père maintint doucement son épouse au creux de ses bras, en tentant vainement de la consoler sans qu'elle s'en rende compte.
    Le médecin n'avait pas le temps de s'émouvoir sur le chagrin qui accablait le couple. L'électrocardiogramme affichait toujours son triste verdict : l'arrêt cardiaque. Il devait tenter de sauver la jeune fille. Il cria aux infirmières d'apporter le défibrillateur, dont l'une d'elles partit chercher au pas de course. Le médecin commença le massage cardiaque avec rapidité, quand l'appareil arriva enfin, il prit les palettes pour les approcher de la poitrine de la jeune fille. Tout le monde recula sous son injonction, puis un premier choc électrique survint, mais l'électrocardiogramme n'afficha aucun changement. Second choc électrique, toujours rien. Le médecin augmenta encore d'un cran les joules, puis un troisième électrochoc souleva de nouveau le corps chétif. Aucun rythme sinusal...
    Le médecin poussa un juron, car il devait se résoudre à prononcer l'heure du décès. Il secoua la tête puis émit d'une voix sans émoi :
    – Heure du décès : 17 h 36.
    C'était fini. L'homme grisonnant qui avait essayé de la sauver la contempla avec tristesse. Elle était si jeune ! Le médecin d'un geste doux ferma les yeux vides de toute vie de la jeune Laura. Puis l'équipe d'aides-soignantes prit le relais autour du corps et tenta de donner un peu d'ordre dans la pièce pour que les parents puissent se recueillir auprès de leur fille.

    Quand les parents entrèrent de nouveau dans la chambre devenue pesante, les larmes et la douleur maculaient toujours leur visage comme un masque devenu une seconde peau. Ils s'approchaient d'un pas lent vers le corps de leur douce Laura. Sa peau était encore plus pâle qu'auparavant, mais son visage semblait si paisible. Avait-elle trouvé la sérénité ? Ils l'espérèrent de tout leur cœur ! La vie s'était tellement montrée injuste avec leur doux petit ange.
    Laura n'avait que quinze ans quand elle fut atteinte de leucémie. Avant cela, la jeune fille respirait tant de joie de vivre ! Cette jolie blonde aux yeux bleus avait toujours su se faire aimer d'autrui. Elle n'était que pure bonté.
    Elle avait passé les deux années suivantes à suivre des traitements éprouvants pour son jeune organisme : chimiothérapie, radiothérapie, puis greffe de moelle osseuse qui avaient su prolonger sa vie. Tout le monde crut qu'elle s'en était enfin sortie, mais au fond Laura savait que le cancer finirait par gagner. Son instinct fut le bon, elle venait de fêter ses dix-sept ans, quand elle eut une récidive. Seulement, les avis des médecins ne furent pas optimistes quant à sa survie. Au fil du temps, Laura perdait toute envie de se battre contre la maladie et ne voulait plus d'acharnement thérapeutique. Durant deux semaines, elle s'était retrouvée à l'hôpital pour y terminer ses jours. Pourtant, la jeune fille aurait préféré mourir chez elle, au calme et dans un endroit qui l'avait aimé et choyé.

    Ses parents se recueillirent encore plusieurs minutes sur les souvenirs de leur vie passée, une oraison funèbre silencieuse pour un dernier au revoir. Ils savaient au fond d'eux qu'elle ne souffrirait plus jamais. Désormais, elle devait être enfin en paix.
    L'esprit de Laura qui était toujours omniprésent voulait également leur souffler un dernier adieu. Soudain, une lumière aveuglante lui fit face, étrangement elle n'était pas effrayée, bien au contraire ! Elle savait qu'au fond d'elle, elle devait la traverser. C'est d'une démarche assurée et paisible qu'elle avança dans sa direction. Quand elle franchit cet étrange passage, une onde d'amour et de chaleur vint l'emmitoufler entièrement. Elle était libre, libre d'explorer un univers qui regorgeait de secrets. Ici, elle pourrait veiller à jamais sur ses parents et les attendre. Laura savait qu'elle l'avait échappé belle ! Elle était morte sans souffrance et dorénavant, elle sourira depuis l'au-delà.

     

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